La forêt-jardin

Un espace ensauvagé aux multiples fonctions

La forêt-jardin

Les différentes dénominations de la forêt-jardin

Forêt-jardin, jardin-forêt, forêt comestible ou forêt-verger : ces déterminations sont équivalentes. On parle bien ici d'espaces boisés composés en partie de végétaux donnant des fruits comestibles et comprenant les strates classiques que l'on trouve en forêt : les arbres, les arbustes, les arbrisseaux, les lianes et les herbacées.

Nous avons décidé de créer une forêt comestible à Montagne et Vie sur une partie de notre forêt.

 

Bien choisir l'emplacement de la forêt comestible

Nous avons choisi la partie Sud de notre forêt pour créer notre forêt comestible. Voici les raisons pour lesquelles nous avons choisi cette parcelle :

  • c'est une zone relativement plane, ce qui est bien pratique pour la récolte ;
  • elle est bien ensoleillée, c'est indispensable car les arbres fruitiers ont besoin d'être exposés au soleil. On dit qu'ils sont héliophiles (du grec "helios" : le soleil) ;
  • elle est non-exposée au vent dominant. Les arbres fruitiers ont des bois relativement fragiles et sont donc sensibles à la casse, surtout lorsqu'ils sont chargés en fruits ;
  • elle est située à l'abri des vents froids et donc mieux protégée contre le gel.

Le plaqueminier offre des récoltes abondantes en kaki. S'il n'est pas sensible au gel, il s'avère fragile en cas de vents forts, surtout lorsqu'il est chargé en fruits.

 

Conserver des arbres forestiers dans la forêt comestible

Une forêt comestible ne se compose pas uniquement d'arbres fruitiers. Il faut y laisser pousser des arbres forestiers qui y croissent naturellement comme :

  • le hêtre
  • le frêne
  • le robinier
  • le mélèze
  • le boulot

Ces grands arbres formant la canopée vont créer un microclimat favorable aux arbres fruitiers. Ils vont créer un effet brise-vent protégeant la forêt-jardin des vents froids l'hiver et des vents secs l'été. Les arbres feuillus vont fortement pourvoir le sol en humus, ce qui va améliorer la fertilité.

 

Les arbres collaborent-ils ensemble ?

Il est observable que les arbres sont en compétition pour l'accès à la lumière. Celui qui monte le plus haut et le plus rapidement va capter la lumière au dépend des autres situés en-dessous.

Toutefois, ce qui est valable pour l'accès à la lumière ne l'est pas toujours pour l'accès à l'eau et aux nutriments du sol. Il est très probable que le système racinaire des arbres soient interconnectés par un réseau mycorhizien. Le réseau mycorhizien se constitue d'un ensemble de champignons. Dans le sol, les champignons existent sous forme de filaments extrêmement longs connectés aux poils absorbants des racines des arbres. Les champignons apportent aux arbres de l'eau et des minéraux. En échange, les champignons reçoivent la sève des arbres comme alimentation.

Grâce à ce réseau formé par les champignons, les arbres peuvent aussi échanger entre eux des nutriments, des informations, etc. Pour aller plus loin sur le sujet, il est possible de se référer aux travaux de Suzanne Simard, professeure d'écologie forestière et de Peter Woleben, ingénieur forestier.

 

La forêt-jardin : un oasis de biodiversité

Une grande diversité d'espèces arboricoles permet à la forêt-jardin de développer une résilience élevée en cas d'aléas climatiques. Plus la biodiversité végétale est élevée, plus la biodiversité animale l'est aussi. Il est important de préserver, voire de développer dans certains contextes la biodiversité.

Les cas de faible biodiversité engendrent des déséquilibres écologiques. La forêt comestible sera exposée à la prolifération d'insectes ou de champignons qui deviendront néfastes par leur grand nombre et diminueront la qualité et la quantité des récoltes.

Il est alors primordial de favoriser la biodiversité en :

  • implantant un nombre d'arbres fruitiers de différentes familles, espèces et variétés. En bref, c'est l'exact inverse de la monoculture ;
  • en laissant pousser la flore endémique, c'est-à-dire les espèces végétales présentes spontanément ;
  • en veillant à ce que toutes les strates forestières soient bien présentes ;
  • en créant des zones sauvages très peu fréquentées par l'espèce humaine ;
  • en préservant les corridors écologiques constitués de haies et de bosquets. Ils lient la forêt comestible avec les autres zones forestières ou bocagères.

Une biodiversité importante garantira un sol vivant et favorisera des récoltes satisfaisantes en qualité et en quantité.

Coccinelles sur pommier en floraison. Leurs larves sont de grandes consommatrices de pucerons.

 

Comment la forêt jardin préserve-t-elle vos arbres fruitiers des gelées tardives ?

L'ennemi numéro 1 des récoltes abondantes, c'est la gelée tardive qui se produit fin avril jusqu'à la mi-mai. Lorsque les fleurs sont formées, elles sont très sensibles aux températures négatives. Une seule gelée peut ruiner vos espoirs de récoltes. Il faut surveiller les fruitiers à floraisons précoces et/ou sensible comme :

  • les abricotiers,
  • les amandiers,
  • les actinidia,
  • la vigne,
  • etc.

L'intérêt de cultiver ses arbres fruitiers en milieu forestier est justement de les protéger du gel. Les arbres forestiers (hêtre, chêne, noyer, châtaigner, robinier), de part leurs branchages et les quelques feuilles mortes qui s'accrochent encore à leurs branches, forment une protection contre les vents froids. La zone va donc se refroidir moins vite et moins fort qu'en plaine. Les grands arbres gardent la chaleur au sol. Ils ralentissent les rayonnements infra-rouges longs émis depuis le sol. La température du sol se refroidira moins vite qu'en plaine ou en verger classique. La combinaison de ces facteurs permet de gagner quelques précieux degrés pour préserver les fleurs des arbres fruitiers contre les morsures du gel.

Les pommiers, les poiriers, les noyers, et les châtaigniers sont à floraison plus tardive et donc moins sensibles aux gelées tardives. Ils pourront donc occuper les zones plus froides de la forêt comestible. Quant aux noisetiers, ils fleurissent dès la fin de l'hiver. Leurs fleurs minuscules sont parfaitement adaptées aux rigueurs de l'hiver.

Les arbres persistants comme les pins, les mélèzes, les chênes verts forment une protection très efficace contre les vents froids. Ils peuvent être implantés sur la face Nord de votre parcelle.

 

Zones sauvages

Nous laissons la partie Nord de notre forêt en zone sauvage. Nous y allons le moins possible pour ne pas déranger la faune qui l'habite. Nous venons uniquement y prélever les arbres destinés pour le bois de chauffage. Cette forêt se compose de :

  • hêtres
  • robiniers faux-acacia
  • noyers
  • frênes
  • châtaigners
  • boulots
  • érables
  • cornouillers
  • églantiers
  • houx
  • fragons
  • lierre
  • fougères
  • crocus

En y allant le moins possible, nous laissons l'endroit paisible pour la faune, notamment les oiseaux. La présence des oiseaux est essentielle car :

  • ils disséminent les graines des arbres ;
  • ils consomment des insectes, des larves, des chenilles, régulant ainsi les espèces dites "invasives" ;
  • ils nous émerveillent par leur plumage et leur chant.

L'églantier est un arbuste épineux. Il pousse spontanément en lisière de forêt. Ces fruits comestibles, les cynorrhodons, sont très riches en vitamine C. Ils sont à consommer lorsqu'ils ramollissent, aux alentours des premières gelées hivernales.

 

Quelle place pour les animaux domestiques dans une forêt-jardin ?

Nous estimons que la présence de chiens et chats est inappropriée dans un jardin-forêt. Elle perturbe la faune sauvage. Les chiens vont y marquer leur territoire par leurs urines. Ils peuvent pénétrer exceptionnellement en forêt au printemps pour gêner les chevreuils s'ils sont présents en trop grand nombre.

Les chats sont à proscrire en forêt et ailleurs de manière générale. Leur comportement de prédateur exerce une trop forte pression sur les oiseaux. Ils participent au déclin de la biodiversité.

Geai des chênes nourrissant ses petits.

 

Bibliographie, ressources et inspirations pour sa forêt-jardin

On aime le livre :

  • Jardins-forêts - un nouvel art de vivre et de produire, de Fabrice DESJOURS, Éditions Terran

Quelques personnes qui nous inspirent :

  • Francis HALLÉ, botaniste, biologiste et dendrologue ;
  • Gilles CLÉMENT, jardinier, paysagiste, botaniste, entomologiste, biologiste et écrivain ;
  • Christophe DRÉNOU, docteur en architecture végétale, ingénieur R&D en biologie de l'arbre.